Interview du Guitarist de Février 2002
Guitarist (Tom Beaumont): Vous
avez un succès plutôt phénoménal avec une musique qui tient plus de la
tornade que de l'hymne populaire, cela t'étonne?
Mick Thompson (Slipknot #7): Tu veux dire que
ça me met sur le cul. On a toujours fait ce qu'on a voulu, sans rien calculer,
sans rien planifier, mais avec une volonté, produire une musique "différente"
et agressive en créant un son. Ce n'était pas gagné d'avance, d'autant que
d'où on vient, Des Moines dans l'IOWA, jamais personne n'avait même conclu le
moindre deal avec une maison de disques. Alors, comme tu dis, ça m'étonne.
Sauf qu'on a quand même beaucoup bossé. On a répété comme des fous, et à
neuf ce n'est pas si évident, on a labouré le terrain comme c'est pas permis.
On a donné tous les concerts qu'on pouvait donner là où on nous acceptait.
Tous les jours de la semaine, à en avoir mal au dos au point d'avoir du mal à
jouer. Surtout que sur scène, ça cartonne sévère. Alors oui, ça m'étonne,
mais je crois que le public a fini par se rendre compte qu'il y avait vraiment
un truc, un vrai groupe, derrière les masques.
G: Mais porter ces
masques et vous identifier par de simples numéros, c'est ce qui vous a fait
connaître?
MT: Ouais... Ce dont on était sûr, comme
pour la musique, c'est que si on ressemblait à tout le monde, on n'irait pas
bien loin. Quand on a formé le groupe, nous voulions exprimer le plus
totalement possible ce que nous ressentions de la vie, du monde. En créant une
entité de musiciens aussi soudés que masqués. Que les gens aiment ou détestent.
En tout cas, on n'a jamais dévié une seule fois de notre integrité pour
vendre des disques.
G: Le nouvel album,
IOWA, est même encore plus extrême que le précédent...
MT: Ouais, c'est un putain de bon album. Plus
brutal, mais aussi plus diverdifié dans le son, alternant des morceaux hyper métal
et d'autres plus expérimentaux que tout ce qu'on avait pu faire avant. Je suis
parfois resté sur le cul devant la précision chirurgicale de la tempête que
neuf musiciens peuvent déclencher.. Je suis très content que Corey (le
chanteur .ndr) se soit éloigné du flow de toute cette merde rap, parce que
cela nous écarte définitivement de toute assimilation au new métal. Tous ces
groupes qui écrivent de stupides petites chansons dans l'intention de passer à
la radio et d'avoir un clip en boucle sur MTV. On n'a rien à voir avec toute
cette merde style Orgy. J'ai craqué sur Master Of Puppets quand j'avais 13ans,
et ensuite j'ai plongé dans le shred, le speed, le death, Deicide, Testament,
Morbid Angel, Exodus, Immolation. Tu vois d'où je viens? Sûrement pas de Korn.
Même si on a bossé avec Ross Robinson, qui les a produits, aprce que ce mec
est un grand. Il faut vraiment travailler avec lui pour saisir qu'il a à la
fois le sens de la perfection et une compréhension aigüe de la musique. Et il
adore la guitare.
G: Il a été servi
dans IOWA où toi et Jim Root, l'autre guitariste, balancez des riffs encore
plus rapides qu'avant. C'est l'ancien shredder qui s'est fait plaisir?
MT: En fait, je suis un shredder obsessionnel
mais antisocial. J'ai aimé tout un tas de trucs, mais j'ai toujours voulu faire
le mien. J'ai joué beaucoup plus technique dans cet album, je me suis fait
plaisir en utilisant par exemple pas mal d'harmoniques artificielles et de notes
mortes. J'adore jouer vite. Je ne joue qu'un seul riff tout au long de IOWA,
mais il est génial. Pour moi jouer est un putain de défi, je fais parfois des
plans difficiles quasiment uniquement pour prouver que j'y arrive. Je mets par
exemple un point d'honneur à utiliser tous les doigts de la main gauche sur le
manche et surtout à en avoir le plus parfait contrôle. C'est quand même plus
intéressant que le niveau zéro du dropped-D tuning à un doigt qu'on entend
partout. C'est la seule façon de progresser.
G: Quels accordages
utilisez-vous?
MT: Pour IOWA, nous avons évolués, Slipknot
évolue toujours. En plus de notre habituel accordage en Si (Si, Fa#, Si, Mi,
Sol#, Do#), nous sommes descendus plus bas, en La (La, Mi, La, Ré, Fa#, Si).
Quand j'ai rejoint le groupe, ils étaient en Ré, moi j'étais déjà en Do#,
parce que je jouais du black sabbath. Les gars m'ont suivis parce que cela
sonnait tout de suite plus gros. Alors aujourd'hui où un paquet de groupes sont
en Si, nous on passe au La. Mais la seule utilité d'un accordage spécial,
c'est de servir ta musique, tes compos, sinon c'est vraiment du pipeau.
G: Composer à 9,
c'est facile?
MT: C'est cool. Moins compliqué qu'on ne
pourrait penser. T'arrives avec les riffs principaux, la basse et tout le monde
se greffe dessus. Mais cela dépend, il suffit que l'un d'entre nous ait une idée
qui corresponde à la vibe des autres et tout peut s'enchaîner.
G: Parlons matériel,
tu as été vendeur dans un magasin de musique et il paraît que tu as une
chouette collection?
MT: Je suis dingue des guitares, j'en ai au
moins une quarantaine, et le pire, c'est que je m'en sers, elles m'inspirent
toutes une façon de jouer différente. J'ai un peu de tout, sauf des 7-cordes
dont j'exècre le manche, et pourtant j'ai des putains de grandes mains. En
dehors de cela, je continue à acheter des instruments, une bonne dizaine ces
derniers mois, y compris une acoustique nylon Alvarez-Ayiri que je joue
uniquement en power chords. Mais ma guitare principale reste une BC Rich Warlock
équipée, comme la plupart de mes solide-bodies de micros EMG, un 89 en grave,
un 81 en aigu. J'en ai plusieurs, mais je suis fou d'une noire qui délivre le
spectre parfait de toutes les fréquences graves, médiums, aigües. Chaque
guitare est unique, tu sais, même fabriquée dans un acajou, un érable et un
ébène d'un lot identique. C'est incroyable. BC Rich m'a fabriqué une custom
qui rappelle la King V Jackson qui me plaît aussi beaucoup.
G: Et dans quoi
branches-tu tout ce petit monde?
MT: Dans une tête VHT Pitbull Ultra Lead,
avec un vieux baffle 4x12 Carvin. Avec pas mal d'effets qui font parfois croire
que de vraies guitares ne sont que des samples, en tout cas au niveau du son.
J'essaye pas mal de trucs, en me moquant du chaînage traditionnel parce que
parfois, cela donne des drôles de résultats, comme une Big Muff dans un
Fuzztone Maestro avec un Ring Modulator et un Q-Tron. J'utilise beaucoup de pédales
Electro-Harmonix et en live j'ai un pédalier Bradshaw pour commander le tout.